1900-2023 : les étudiant.e.s sénégalais.e.s face au travail salarié en France ; une approche sociologique, multisituée et longitudinale

Résumé de la thèse :

Cette thèse propose de porter un regard nouveau sur la migration étudiante sénégalaise en France (MESF). Elle part du constat selon lequel cette migration est souvent présentée (sur le plan politique et parfois scientifique) à partir d’une vision enchantée, mythique, mettant en avant sa singularité et négligeant de revenir sur elle-même pour interroger ses présupposés ou ses idées reçues. Cette singularité amène à (1) penser la MESF de fait comme provisoire, car les ESF sont supposé.e.s retourner chez eux/elles à la fin de leurs formations. Elle suppose aussi (2) de considérer les étudiant.e.s sénégalais.e.s en France (ESF) comme des « privilégié.e.s », car ils et elles bénéficieraient de soutiens financiers de leur État d’origine et/ou de leurs familles durant leur migration ; (3) ou comme les futures « élites » de leur pays de départ du fait de leurs origines sociales et/ou de leurs filières d’études ; (4) ou encore comme des « jeunes » pendant et tout au long de leur cursus universitaire et parfois même après leur formation. Tout ceci ferait que cette migration se dissocie et, par conséquent, qu’on se doit de la dissocier totalement des autres formes de migrations. Or, la MESF est sans doute le domaine par excellence où se produisent et se reproduisent, d’une manière peut-être moins visible mais réelle, les enjeux et les conflits inhérents aux autres formes de migration (pour des raisons de travail, familiales, etc.) dans le passé comme aujourd’hui. Une des clés de lecture, sinon l’une des plus pertinente pour l’étudier, est de s’intéresser à la place que le travail salarié a prise au cours de l’histoire de la MESF. Comment comprendre et analyser les bouleversements que l’on peut repérer entre le début de la MESF dans les années 1900 – où les ESF ne travaillaient pas en parallèle de leurs études – et aujourd’hui où ce phénomène a progressivement vu le jour, s’est diffusé et généralisé ? En mettant au centre de l’analyse la place progressive prise par le travail salarié au cours de l’histoire de la MESF, cette thèse ne vise pas simplement à rendre compte des processus qui ont mené à cet état de fait. Étudier ces processus n’est en réalité qu’une première étape pour revenir sur les différents contextes historique, statistique et sociologique de la MESF depuis ses débuts jusqu’à nos jours. Car si nous voulons comprendre la place que le travail salarié occupe aujourd’hui dans MESF et les conséquences qui en découlent, tant sur le déroulement des études que sur le retour au pays ou l’installation durable en France des étudiant.e.s sénégalais.e.s, il est indispensable de prendre en compte l’histoire de cette migration, les différentes formes qu’elle a prises, ses évolutions. Ainsi, la place du travail salarié sera étudiée à travers « cinq âges » ou périodes marquantes successives de la MESF. Pour étayer ces analyses, l’enquête se base sur des matériaux collectés en France et au Sénégal pendant mes années de master et de thèse entre septembre 2013 et septembre 2023, soit plus de dix années d’enquête ethnographique.

Jury :

Jean-François GIRET, professeur de sciences de l’éducation à l’Université de Bourgogne et directeur du Céreq, Marseille (examinateur)

Nathalie KOTLOK, maîtresse de conférence HDR en géographie à l’Université de Poitiers (examinatrice)

Vanessa PINTO, maîtresse de conférence en sociologie à l’Université de Reims (examinatrice)

Djaouidah SEHILI, professeure de sociologie à l’Université de Reims (rapporteure)

Mahamet TIMERA, professeur de sociologie à l’université Paris Cité (rapporteur)

Henri ECKERT, professeur émérite à l’Université de Poitiers (directeur)