Résumé de la thèse : La thèse prend pour objet les pratiques des conseillères principales d’éducation (CPE) et examine leur contribution au travail institutionnel de socialisation scolaire, dans une division du travail éducatif spécifique à l’enseignement secondaire français. Articulant sociologies de l’éducation, de la socialisation, du travail et des groupes professionnels, elle montre que les pratiques de ces agents « secondaires » des collèges et lycées contribuent au premier plan à rendre effective la scolarisation obligatoire, injonction autant légale que sociale. L’enquête a combiné des observations durant trois années auprès de CPE, une campagne d’entretiens, la passation d’un questionnaire et le dépouillement d’archives (textes réglementaires, revues professionnelles, etc.). La recherche menée rend compte de la façon dont les CPE en viennent à occuper dans les établissements scolaires une position centrale dans la régulation des conflits de socialisation. La « vie scolaire » apparaît comme l’émanation des politiques de massification scolaire, qui ont orienté in situ les pratiques des CPE vers les élèves à distance des réquisits scolaires. À rebours de l’idée selon laquelle il suffirait de décréter l’obligation scolaire pour qu’elle soit effective, l’enquête montre le travail sur lequel elle repose sur le plan de la contrainte et de l’ajustement des corps aux situations de classe. Pour les élèves habitués des bureaux des CPE, le cadre socialisateur (du) secondaire qu’est la vie scolaire est en réalité loin d’être subsidiaire. Il contribue, au contraire, à différencier et à singulariser l’ expérience scolaire des élèves dans les établissements, à les maintenir dans l’institution, à pacifier des conflits au cœur de certaines scolarités et au sein des établissements. La thèse documente ainsi les « coulisses » de la scolarisation, par l’analyse du travail d’encadrement, de contrainte, et des modes relationnels (scolaires) singuliers déployés par les CPE en marge des espaces nobles de l’école. Elle renseigne ainsi le travail concret que nécessite le fait de « tenir » les élèves du secondaire autant que de leur « permettre de tenir » dans un cursus scolaire ; mais aussi, finalement, de « faire tenir » une institution particulièrement traversée par des logiques hétérodoxes aux logiques scolaires.
Jury :
Romuald BODIN – Professeur de sociologie, Université de Nantes, CENS (rapporteur)
Stéphane BONNÉRY – Professeur de sciences de l’éducation, Université de Paris 8 Saint-Denis, ESCOL (examinateur)
Muriel DARMON – Directrice de recherche au CNRS, CESSP (examinatrice)
Étienne DOUAT – Maître de conférences en sociologie, Université de Poitiers, GRESCO (co-directeur)
Mathias MILLET – Professeur de sociologie, Université de Poitiers, GRESCO (co-directeur)
Delphine SERRE – Professeure de sociologie, Université Paris Cité, CERLIS (rapporteure)