Ludovic GAUSSOT, Nicolas PALIERNE, La confiance dans les relations familiales. Régulation des sorties juvéniles, genre et usages sociaux de psychotropes, Rennes, PUR, 2020, 212 p.

Si la relation de confiance apparaît comme un mode privilégié des rapports parents-adolescents, elle se trouve aussi mise en jeu et à l’épreuve dans la négociation et l’encadrement des sorties et des consommations juvéniles. On y observe par exemple une différenciation genrée qui reflète un certain rapport au monde et à ses dangers. Ces pratiques constituent dès lors une entrée pertinente pour étudier l’autonomisation et la construction d’une vie à soi chez les jeunes, les pratiques éducatives genrées ainsi que l’échange, les non-dits et les mensonges parfois à l’œuvre dans les relations familiales contemporaines.


Numéro 9 de la revue Images du travail/Travail des images, juin 2020.

Ce numéro comprend un dossier intitulé « L’apprentissage et l’enseignement professionnel en images », coordonné par Stéphane Lembré et Gilles Moreau. Il comprend également un article en varia, un « Grand entretien » et plusieurs articles dans les rubriques « Images en chantier », « Un œil, une image » et « Comptes rendus ». Ce numéro d’Images du travail, travail des images pose l’hypothèse selon laquelle les images informent beaucoup sur l’apprentissage et l’enseignement professionnel, sur les publics de ces formations, sur le travail des apprentis et des élèves. Une telle hypothèse est née de trois constats : d’une part, les travaux consacrés à l’apprentissage et l’enseignement professionnel, en histoire ou en sociologie, sont relativement peu nombreux (Caspard, 1989 ; Tanguy, 2000) ; d’autre part, et parmi ces travaux, ceux qui mobilisent les images fixes ou animées, seules ou au sein de corpus diversifiés, s’avèrent encore plus rares. De telles images existent pourtant, et sont même parfois interrogées à l’instar de films comme La Vie par les bords, réalisé par Fabrice Cazeneuve et François Bon, sorti en 2005 et diffusé sur la chaîne Arte en 2006 ou encore des documentaires Quel travail ? (2002) et Nous les apprentis (2004) de Cyril Menegun. Les portraits de garçons et de filles en lycée professionnel au Val d’Argenteuil, dans La Vie par les bords, et d’apprentis dans les métiers du bâtiment, dans Nous les apprentis, y font écho aux parcours de formation et de travail restitués dans quelques précieuses autobiographies ouvrières (Vigna, 2016). Enfin, ces images, quand elles existent ou sont diffusées, montrent une figure très masculine de la formation professionnelle, alors que dès les années 1960 le lycée professionnel accueillait presque autant de filles que de garçons (Moreau, 1994). L’illustration de une de ce numéro l’atteste et se veut de ce point de vue un mauvais exemple de représentations, mais à dessein : le monde masculin et au-delà viril et saillant de cette affiche[1], alliant force, mécanique et technicité montre un aspirant cheminot travaillant à la lime… une lime qu’on retrouvera quelques années plus tard (1971) au cœur de L’ordre des choses, l’ouvrage de Claude Grignon consacré aux formations en CET (collège d’enseignement technique) : ce dernier y rangeait la lime « dans la catégorie des instruments d’inculcation morale, au même titre que les retenues, les devoirs supplémentaires ou les taloches » (p. 15). Une « raison technique » qui selon l’auteur était complice de la domination et qui a un temps figé la recherche sociologique sur l’enseignement professionnel avant que Lucie Tanguy ne vienne y ouvrir de sérieuses brèches (1991).


Stéphane Bonnéry, Étienne DOUAT (dir.), L’éducation aux temps du coronavirus, Paris, La Dispute, 2020, 160 p.

Le 12 mars 2020, face à la pandémie, le Président de la République annonce la fermeture de tous les établissements d’enseignement. Le ministre de l’Éducation nationale exhorte à assurer la « continuité pédagogique » à distance. Comment, dans l’urgence et l’impréparation, confinés, enseignants et élèves, familles et étudiants font-ils dans les semaines qui suivent ? Que révèle cette « crise » de l’état du système d’enseignement ? Comment ce confinement sert-il à l’accélération des réformes gouvernementales en cours ? Treize spécialistes de l’éducation, de la maternelle à l’université, coopèrent et tentent de répondre à ces questions et d’ouvrir les chantiers de recherche que cette séquence inédite impose. 


Numéro 8 de la revue Images du travail/Travail des images, février 2020.

Ce numéro comprend un dossier intitulé « Filmer, travailler, chercher », coordonné par Baptiste Buob et Jean-Paul Géhin. Il comprend également deux articles en varia, un « Grand entretien » et plusieurs articles dans les rubriques « Un œil, une image » et « Comptes rendus ».


Olivier MASCLET, Thomas Amossé, Lise Bernard, Marie Cartier, Marie-Hélène LECHIEN, Olivier Schwartz, Yasmine Siblot, Etre comme tout le monde. Employés et ouvriers dans la France contemporaine, Paris, Raisons d’agir, 2020.

Il est question dans ce livre de ces femmes et de ces hommes, employées ou ouvriers, qui vivent des revenus de leur travail et s’efforcent de « s’en sortir » par eux-mêmes. Ces travailleurs représentent, aujourd’hui encore, un groupe social stable et important. Beaucoup plus qu’autrefois, ils entrent en interaction directe avec les membres des classes moyennes et supérieures, comme clients ou professionnels de services (garde d’enfants, santé, éducation, commerce, sécurité, transports publics, etc.). Par leurs aspirations, leur fréquentation plus longue du système scolaire, leur accès à la consommation, ils se rapprochent des catégories moyennes ; en même temps, ils demeurent éloignés du capital culturel, leurs ressources économiques restent incertaines et leur travail, peu payé et peu considéré, est toujours subalterne.

Par des portraits de couples et de familles, résidant dans des espaces aussi bien ruraux qu’urbains, de générations et d’âges différents, ce livre éclaire ce que signifie « s’en sortir » ou plus exactement « s’en sortir à peu près » dans la société française actuelle. À rebours des discours convenus sur la « France périphérique » ou sur le « déclassement des classes moyennes », il donne à voir les conditions d’existence de ces classes populaires, stables mais fragiles, leurs pratiques à la fois publiques (travail, sociabilités, engagements bénévoles, rapport à la politique et aux institutions) et privées (économie domestique, rapports de genre et entre générations, loisirs individuels et « temps pour soi »).

Cette série de 21 portraits montre comment ces femmes et ces hommes travaillent à « être comme tout le monde », c’est-à-dire à éviter la relégation parmi les « assistés » et à s’affirmer comme membres à part entière de ce que Robert Castel appelait la « société des semblables ». Elle fait comprendre leurs aspirations autant que leurs déceptions et leurs griefs, la manière dont ils s’efforcent de jouer le jeu d’un ordre social qui pourtant leur fait peu crédit.