- Docteur en sociologie
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modibobah@gmail.com
– Titre : Enquête ethnographique sur le devenir incertain des diplômés maliens formés en France : s’installer en France ou rentrer au Mali ?
– Direction : Tamba Doumbia (Université de Bamako) et Henri Eckert (Université de Poitiers)
– Résumé
Depuis plusieurs années, le nombre des étudiants maliens en France ne cessent d’augmenter[1]. Attirés par la réputation de l’enseignement supérieur français, ils arrivent avec l’ambition d’obtenir un diplôme en France reconnu plus valorisable sur le marché du travail malien. Or nous constatons, dès le début des années 1980, que certains étudiants maliens, une fois diplômés, s’installent durablement en France, souvent dans l’espoir d’une vie meilleure.
Lors de notre mémoire de Master 2, nous avons analysé les trajectoires sociales, migratoires et professionnelles des familles guinéennes ainsi que les pratiques éducatives à travers la scolarité de leurs enfants à l’école primaire en France. Ce travail a permis de constater que notre échantillon d’enquêtés était composé majoritairement de diplômés, un indicateur que nous n’avions pas pris en compte dans notre mémoire. A l’issue de ce travail de recherche de master, parmi les trois pistes d’ouverture, nous avons décidé d’approfondir le thème du devenir des diplômes maliens formés en France.
Plusieurs raisons m’ont amené à choisir cette troisième voie. Il s’agit tout d’abord d’un sujet d’actualité car il rejoint la priorité des pouvoirs publics français et maliens sur la question du retour de migrants qualifiés au pays. Le Mali et la France à travers l’ANPE (Agence Nationale Pour l’Emploi au Mali) et l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration) ont signé le 16 novembre 2013 une convention visant la mise en place d’un programme dénommé Aide au Retour à l’Emploi au Mali. Ce dispositif d’appui vise à faciliter l’insertion professionnelle des diplômés maliens, notamment disposant d’une qualification pointue répondant aux besoins des entreprises maliennes. Il consiste à doter le Mali de cadres hautement qualifiés susceptibles d’agir de façon significative sur la productivité, donc la croissance économique.
Afin de poursuivre les réflexions engagées lors du mémoire de Master 2, nous proposons ici de focaliser l’analyse sur le dilemme : installation en France ou retour au Mali. Nous entendons examiner les trajectoires que suivent les diplômés. Il sera question des étapes du parcours des diplômés, comment celui-ci se déroule et comment ils envisagent leur avenir. Leur rapport au travail, leurs relations avec les résidents, leurs relations familiales ou les pratiques du quotidien. Nous tâcherons de comprendre aussi si le projet migratoire a été mûri avant l’arrivée en France ou s’il est avant tout l’aboutissement d’un fantasme longuement entretenu.
Pour mieux connaître la situation des diplômés maliens qui ont fait le choix de s’installer en France et ceux qui ont fait le choix de rentrer au Mali, nous nous pencherons sur les diplômés ayant achevé leurs études depuis plus de six mois. Six mois c’est la durée de l’autorisation provisoire de séjour (non renouvelable) délivrée aux diplômés étrangers non-européens, sortis d’établissements français et désireux de passer au statut d’étudiant à celui de salarié. Ce laps de temps permet à ces étudiants d’acquérir une première expérience professionnelle.
Notre recherche sur leur devenir s’appuie sur les questions pratiques suivantes, regroupes en trois axes qui constituent autant de pistes de recherche :
– Il s’agit tout d’abord de questions liées à la dynamique du projet migratoire : Qui sont-ils ? Comment peut-on spécifier leur origine socioculturelle ? Pourquoi ont-ils choisi de faire leurs études en France ? Quels étaient les objectifs initiaux de ces diplômés ? Que font-ils pendant leurs études ? De quelle manière le projet migratoire a-t-il évolué ? Quelles sont les raisons qui ont influencé leur choix de rester en France ou de rentrer au Mali ? Les diplômés maliens exercent-ils des emplois qualifiés en conformité avec leur formation initiale? Sont-ils satisfaits de leurs nouvelles conditions de vie ?
– Il convient aussi d’étudier le rôle des familles dans la décision de s’installer en France ou de rentrer au Mali. Est-ce que les familles ont participé à cette prise de décision ? Quelle a été leur position ? Ont-elles essayé de dissuader ou d’encourager les jeunes diplômés dans leur choix ? Le projet d’étude du diplômé s’inscrit-il dans un projet individuel ou collectif ?
– Le troisième axe porte sur la question du retour des diplômés maliens : Ce retour a toujours été un aspect de la migration largement sous-enquêté[2]: Qui sont les diplômés qui retournent ? Combien d’entre eux ont fait le choix cohérent avec leur motivation de départ ? Quelles sont leurs propres perceptions du retour ? Vers quelles formes d’activité/emploi s’orientent-ils ? Sont-ils satisfaits de leurs situations ? N’avaient-ils pas un autre choix ? Mobilisent-ils des réseaux socioprofessionnels dans leur choix de retourner au Mali ? Le retour demande-t-il une réadaptation à leur environnement familial et social ? La valeur du diplôme français correspond-elle à ce qu’ils attendaient ? La décision du retour passe bien souvent par un retour provisoire de quelques semaines à quelques mois afin d’évaluer les possibilités d’insertion au Mali. Ce retour provisoire peut alors favoriser un retour définitif ou au contraire le repousser.
Compte-tenu de la multi-dimensionnalité du questionnement proposé, il nous semble pertinent d’enquêter sur les terrains suivants : Une démarche qualitative, de type ethnographique, sera privilégiée et s’appuiera sur l’observation directe et participante et la réalisation d’entretiens biographiques.
– Les observations et entretiens seront réalisés auprès des diplômés installés en France et au Mali ainsi qu’auprès de leurs familles.
[1] De 1523 visas étudiants en 2006 à 2250 en 2011-2012. Soit une augmentation de 47%. Données fournies par Tristan Charlier, rédacteur Afrique de l’Ouest, Iran, Irak, Afghanistan à la Sous-direction de l’Enseignement Supérieur de la Direction Générale de la Mondialisation, du Développement et des Partenariats (Ministère des Affaires étrangères et Européennes de France).
[2] Rapport d’étude du BIT, « Migration et Retour en Afrique de l’Ouest. Le cas du Mali, de la Mauritanie et du Sénégal », 2009.